Certains l’adoptent pour des raisons de santé, d’autres pour des raisons économiques, par respect de la vie animale ou pour combattre le réchauffement de la planète. Outre ces raisons, auxquelles s’ajoutent diverses considérations d’ordre philosophique, le végétarisme et ses formes dérivées favorisent le développement spirituel des humains que nous sommes.

Jonathan Léger Raymond

Que vous songiez à faire une cure printanière ou à assainir vos habitudes alimentaires pour l’une ou l’autre des raisons évoquées ci-dessus, il convient de le faire en connaissance de cause pour en retirer tous les bienfaits. Je vous propose donc aujourd’hui un billet adapté d’un article sur les principes du végétarisme récemment publié par Jonathan Léger Raymond, thérapeute en ayurvéda et herboriste accrédité, cofondateur du centre Espace Ayurvéda à Montréal et d’Ayurvéda Révolution, une plateforme de référence internationale sur l’ayurvéda et le mode de vie écologique.

L’ayurvéda ne vante pas ouvertement la supériorité du végétarisme sur l’omnivorisme sain. La culture védique reconnaît toutefois que la vie animale est plus évoluée que la vie végétale, et qu’il n’est pas nécessaire d’abattre d’innombrables animaux pour se nourrir alors que la nature fournit gracieusement tous les aliments requis pour vivre en santé. Dans le cadre de la civilisation védique, les personnes ayant un goût pour la viande ne mangeaient donc que la chair des bêtes qu’elles chassaient elles-mêmes ou des animaux qui mouraient de leur belle mort.

De nos jours, les gens qui envisagent d’opter pour un régime moins riche en viande en intégrant des options végétariennes à leur menu redoutent souvent d’éventuelles carences alimentaires, notamment en protéines, en vitamine B12, en fer et en calcium. Pour pallier ces craintes, certaines notions de base en sciences nutritionnelles s’imposent, auxquelles il convient d’ajouter une solide expérience de l’ayurvéda de même qu’un soupçon de gros bon sens.

Mettons-nous donc à table. Au menu: quelques démystifications de mise!

En entrée : la vitamine B12

La vitamine B12 – aussi appelée cobalamine – est une vitamine hydrosoluble notamment active au niveau des fonctions cérébrales et de la croissance cellulaire. Elle est par ailleurs essentielle à la formation des globules rouges; un manque de B12 peut donc entraîner une forme d’anémie.

Certains facteurs peuvent d’ailleurs réduire le taux d’absorption de cette vitamine, parmi lesquels une faible acidité gastrique, des problèmes intestinaux chroniques et certaines maladies auto-immunes. En revanche, bien mastiquer permet à la salive d’augmenter l’absorption de B12! La plupart des gens ont en outre un apport en B12 bien au-delà de leurs besoins alimentaires, et l’excédent se voit stocké dans le foie de manière à constituer une réserve.

La B12 est produite par des bactéries qui interviennent dans le processus digestif des herbivores ainsi que dans certaines fermentations. On en trouve bien sûr dans la viande et, en proportion plus modeste, dans les poissons, les fruits de mer et les œufs. Mais les produits laitiers en contiennent également, et de façon normalement suffisante pour les végétariens. Ce sont donc surtout les végétaliens (véganes) qui sont vulnérables à des carences en B12.

Qu’à cela ne tienne, il existe aussi des sources végétales de B12. On en trouve en effet dans des micro-algues telles la chlorelle et la spiruline, de même que dans des préparations fermentées comme le kombucha, le kéfir, le miso et la choucroute, bien que, dans ces derniers cas, des études plus approfondies doivent être menées pour s’assurer que cette forme de B12 est bien active et assimilable.

Enfin, divers aliments sur le marché sont enrichis de B12, dont des levures alimentaires, des laits végétaux et différentes céréales.

En plat de résistance : les protéines

Pour bien comprendre les protéines, il faut savoir qu’elles se composent de 22 acides aminés, dont 8 sont essentiels: la valine, l’isoleucine, la leucine, la lysine, la méthionine, la phénylalanine, la thréonine et le tryptophane. Essentiels, parce que l’organisme ne peut les synthétiser et parce qu’ils peuvent eux-mêmes servir à la production des autres acides aminés.

Considérés dans leur ensemble, les acides aminés forment les protéines, les hormones et les enzymes nécessaires à la croissance cellulaire et au bon fonctionnement de l’organisme. Selon l’OMS, nos besoins quotidiens en protéines sont de 0,75 g par kilo de poids corporel, ce qui représente moins d’une cinquantaine de grammes de protéines par jour pour un adulte de taille moyenne, soit une quantité facilement atteinte en mangeant à sa faim avec un appétit normal.

À titre comparatif, la viande bovine contient seulement 17% de protéines, alors que les légumineuses sont très riches en protéines. Les haricots et les lentilles, par exemple, en contiennent de 20 à 24%, alors que le soya en contient de 35 à 37%.

Ce qui distingue fondamentalement les protéines de sources végétales et animales, c’est la proportion des différents acides aminés qu’elles renferment.

La digestion de la viande en sépare les acides aminés, qui sont alors recombinés par l’organisme en de nouvelles protéines. On retrouve ainsi dans la viande toute la gamme des acides aminés nécessaires à la fabrication des protéines dans le corps.

Dans le cas de la nourriture végétarienne, les protéines d’un aliment isolé peuvent être pauvres en certains acides aminés essentiels. À titre d’exemple, les céréales sont le plus souvent pauvres en lysine et en isoleucine, tandis que les légumineuses sont pauvres en méthionine et en tryptophane. Au nombre des exceptions, il convient de mentionner le soja, riche en méthionine; certaines variétés de maïs, qui contiennent de la lysine; ou le quinoa et l’amarante, qui sont presque complets en soi comme sources d’acides aminés essentiels.

Lorsqu’une personne manque de protéines ou d’un d’acide aminé essentiel à la construction des protéines, elle ressent la faim plus ou moins constamment. Ses muscles et ses tissus vont par ailleurs s’atrophier à la longue, faute d’une saine réplication cellulaire. Pour éviter une carence en protéines, la solution est cependant toute simple. En effet, il existe une combinaison gagnante qui permet d’obtenir une variété d’acides aminés encore plus complète que la viande. Où trouve-t-on cette fameuse combinaison? Dans le mariage d’un aliment de la famille des céréales et d’un aliment de la famille des légumineuses!

À preuve, l’alimentation de base des peuples du monde entier se compose de céréales combinées à des légumineuses: tortillas de maïs et fèves noires au Mexique; riz et fèves rouges ou lentilles en Amérique du Sud; haricots et millet en Afrique; houmous et pain plat au Moyen-Orient; dhal de haricots mungo et riz ou pain de blé en Inde; riz et tofu en Chine; lentilles et riz à Okinawa… le tout accompagné d’une pléthore de légumes, si bien qu’environ 65% des protéines consommées à l’échelle mondiale sont d’origine végétale.

Cette combinaison gagnante a de plus le mérite d’assurer une alimentation remarquablement équilibrée et faible en acides gras saturés et en cholestérol, sans compter – écologie oblige – qu’il faut de 7 à 10 kilos de protéines végétales pour produire un seul kilo de protéine animale…

En dessert : les minéraux

Une fois réglée la question de la B12 et des protéines, planent encore certaines inquiétudes quant au calcium et au fer, que l’on associe habituellement aux produits laitiers et à la viande, respectivement.

Pour ce qui est du calcium, clarifions un point important: bien que les produits laitiers en contiennent effectivement beaucoup, ils ne sont pas des sources privilégiées de ce minéral. Pourquoi? Parce que les produits laitiers sont également riches en phosphore, un minéral acidifiant que le corps doit neutraliser avec des minéraux alcalinisants comme le magnésium ou… le calcium. Ce qui fait qu’une partie du calcium laitier sert à tamponner sa propre acidité!

Les légumes verts, largement alcalinisants, ne présentent pas ce problème. Tout leur contenu en calcium reste à la disposition de l’organisme. Les germinations et les légumes vert foncé, comme les épinards, le chou frisé (kale), le persil, la bette à carde ou le chou cavalier (collard), sont pour leur part riches en magnésium, en fer et en de nombreux autres minéraux et oligo-éléments. Le contenu en fer de ces légumes rivalise d’ailleurs largement avec celui de la viande, et ils contiennent de la vitamine C, favorable à son absorption.

Bref, les légumes permettent haut la main d’éviter toute carence en calcium et en fer. Les inquiétudes à ce sujet font figure de faux problèmes, en grande partie dus à une connaissance déficiente des régimes alimentaires sans viande.

En ce qui concerne les suppléments dits «naturels» qui concentrent les minéraux en capsules, sachez qu’ils ne peuvent égaler l’agencement et la dispersion naturelle des molécules, ni compenser la présence de cofacteurs d’absorption. Certains suppléments sont même susceptibles de former des pierres aux reins s’ils sont pris en excès ou s’ils ne sont pas bien éliminés. Dans la mesure du possible, le corps préfère toujours une alimentation complète et équilibrée.

En conclusion, vous n’avez aucune inquiétude à avoir si vous optez pour une alimentation végétarienne variée ou si vous vous inspirez des régimes traditionnels issus des cultures anciennes du monde. Une bonne combinaison de céréales et de légumineuses rehaussée d’une riche dose de légumes feront largement l’affaire. Manger végétarien, c’est sain, simple et facile!

Végétarisme et ayurvéda