Filet - Catégorie - Il était une fois
Margaret McCollum

Le vide que laisse la disparition de l’être aimé est souvent difficile, sinon impossible à combler. Certains trouvent cependant des moyens de garder leur amour vivant et présent à leur esprit. L’anecdote qui suit m’a inspiré un rappel des multiples formes que peut prendre le smarana, la réminiscence de l’Infiniment Fascinant.

Peu avant Noël 2012, une dame visiblement bouleversée demande au personnel de la station de métro Embankment, à Londres:

— Qu’avez-vous fait de la voix?

— Quelle voix, madame? lui répond-on d’un air dubitatif.

— La voix de l’homme qui disait: «Attention au vide! (Mind the gap!)» pour dire aux gens de prendre garde de ne pas tomber dans le vide entre le quai et les wagons de métro.

— Ah, cette voix-là… N’ayez crainte, madame, nous prévenons toujours les usagers. Nous avons simplement mis nos systèmes à jour, et remplacé l’ancien avertissement par un nouveau message électronique.

— Mais cette voix, réplique la dame, c’était celle de mon mari!

Il s’agissait effectivement de la voix d’un acteur de théâtre du nom d’Oswald Laurence, mort en 2007. Il avait enregistré le fameux message près de 50 ans plus tôt, et les usagers du métro londonien avaient pu l’entendre toutes ces années dans les différentes stations de la ligne Northern en direction nord.

La dame en peine venue s’adresser au personnel de la station Embankment s’appelait Margaret McCollum, et elle trouvait réconfort et consolation dans la voix de son cher mari disparu chaque fois qu’elle prenait le métro depuis cette station voisine de son domicile.

Profondément attristée de ne plus pouvoir entendre la voix de son bien-aimé, madame McCollum entreprit d’écrire aux autorités de Transport for London, l’organisme public responsable des transports en commun dans la métropole anglaise, pour expliquer son désarroi et demander qu’on lui envoie à tout le moins une copie de l’enregistrement de l’amour de sa vie.

Touchées par l’histoire de cette femme, les autorités en place ont alors convenu, non seulement d’envoyer une copie de l’enregistrement à madame McCollum, mais de remplacer le nouveau message électronique par la voix originale d’Oswald Laurence dans la station Embankment!

Si d’aventure vous empruntez la ligne Northern du métro de Londres en direction nord depuis la station Embankment – et seulement depuis cette station! –, vous entendrez donc le message de mise en garde de la bouche d’Oswald plutôt que la voix numérique entendue partout ailleurs. Puisse-t-il vous rappeler que l’amour peut être éternel, sinon ici-bas du moins dans l’au-delà.

Joyeux Noël, madame McCollum!

Attention au vide!