La série consacrée à l’épopée du Mahabharata racontée par Normand Vanasse se poursuit…

Voir l’épisode précédent.

Panique chez les Kourous

La nouvelle du mariage de Draupadi avec les Pandavas se répandit comme une traînée de poudre. Tous savaient maintenant que le brahmana qui avait atteint l’œil du poisson était bel et bien Arjuna. Tous avaient cru que les Pandavas, ainsi que leur mère, avaient trouvé la mort dans l’incendie du palais de laque à Varanavata. Ils étaient donc maintenant vus comme revenant du royaume des morts, et tous maudissaient encore et encore les perfides manœuvres de Dhritarashtra.

Après la cérémonie du svayamvara, tous les rois et les princes retournèrent dans leur royaume respectif. Lorsque Duryodhana apprit que Draupadi avait choisi Arjuna comme époux, la tristesse et la peur s’emparèrent de lui. Quant à Vidoura, lorsqu’il apprit que les Pandavas avaient gagné la main de la belle Draupadi et que Duryodhana et ses alliés avaient connu l’humiliation, il s’en réjouit vivement. Il alla aussitôt trouver le roi Dhritarashtra.

— Par la grâce de Dieu, lui dit-il, les Kourous se portent à merveille.

Le roi aveugle crut que Vidoura faisait allusion à ses fils, et que Duryodhana s’était mérité la main de Draupadi. Il ordonna aussitôt qu’on confectionne des ornements et des vêtements pour Draupadi, et que Duryodhana et sa nouvelle épouse soient reçus à Hastinapoura en grande pompe. Vidoura expliqua cependant à Dhritarashtra qu’il parlait des fils de Pandou, et que Draupadi avait choisi d’épouser les Pandavas, ne manquant pas d’ajouter que ces derniers avaient désormais pour alliés le roi Droupada ainsi que les dynasties Yadou et Vrishni.

Dhritarashtra fit semblant d’être content d’entendre ces nouvelles au sujet des Pandavas, mais en réalité, son cœur était lacéré d’apprendre qu’ils se portaient si bien. Il dit à Vidoura:

— Je suis heureux que les fils de mon frère soient vivants. Ils me sont plus chers encore que mes propres fils. Quelle n’est pas leur fortune d’avoir maintenant plusieurs amis, tout particulièrement le roi Droupada.

— Que ces sentiments t’habitent pendant au moins cent ans, répondit Vidoura avant de prendre congé.

Aucun répit

Peu après, Duryodhana alla s’entretenir avec son père:

— La Providence a voulu que les Pandavas deviennent riches et puissants. Je suggère que nous mettions tout en œuvre pour les affaiblir. Rassemblons immédiatement les Kourous afin de discuter d’un plan pour empêcher les Pandavas de nous assujettir.

— Mon fils, répondit Dhritarashtra, je ne désire que ton bien. Je ferai tout ce que tu me demanderas, mais avant d’élargir la discussion, si tu as une idée en tête, expose-la ici même que je l’entende.

— Nous pourrions semer la discorde entre les fils de Kounti et ceux de Madri. Ou inciter le roi Droupada à se rallier à notre camp en lui offrant des présents. Peut-être pourrions-nous aussi envoyer des espions tuer Bhima; il serait ensuite plus facile de vaincre les Pandavas. Mieux encore: offrons aux Pandavas une jeune beauté céleste, de sorte qu’ils négligent Draupadi et qu’elle les quitte. Peu importe le moyen, il nous faut vaincre les Pandavas.

Karna intervint alors:

— Cher Duryodhana, ce raisonnement n’a aucun sens. À plusieurs reprises déjà, tu as tenté de tuer les Pandavas. Ils ont maintenant grandi et leur puissance s’est accrue. Comment arriveras-tu à les vaincre? Il te sera impossible de semer la dissension parmi eux. Draupadi les a choisis alors qu’ils vivaient dans la pauvreté; les abandonnera-t-elle maintenant qu’ils prospèrent? Droupada est un roi honnête, et nous ne pourrons pas l’acheter avec nos cadeaux. Dhrishtadyoumna a créé des liens solides avec les Pandavas, des liens que nous ne saurions briser, même en lui offrant tout l’or du monde. Je crois plutôt que nous devrions les attaquer et les faire disparaître de la surface de la Terre. Attaquons-les maintenant, pendant qu’ils ne s’y attendent pas.

Touché par ce discours héroïque, Dhritarashtra s’adressa à Karna en ces termes:

— Tu possèdes une grande intelligence, lui-dit-il, ainsi qu’une force phénoménale. Mais avant d’agir, écoutons les avis de Bhishma, de Drona et de Vidoura. Nous adopterons ensuite un plan d’action adapté à nos besoins et à nos aspirations.

L’épopée du Mahabharata – Épisode 25